La pandémie a infecté et affecté tous les aspects de nos vies et la culture ne fait pas exception. Les artistes français restant interdits de séjour dans la Baie, la Villa San Francisco accueille depuis septembre des micro-résidences nommées « Hatch Series » sous la direction artistique de Candace Huey (Galerie Re.Riddle) avec des artistes locaux, quel que soit leur passeport.
Dans le cadre du processus de sélection, le candidat est invité à répondre à la question suiante : «Comment relevez-vous les défis les plus pressants de notre temps ?».
Scott McKinney était proche du candidat parfait avec sa dernière performance créée pour la Villa San Francisco. Après seulement une minute d’interview, il nous confie «Je cherche toujours à explorer les questions qui se posent dans ma vie quotidienne de manière créative en traitant les idées sur lesquelles je m’interroge de manière visuelle».
Mais quelles sont donc ces «idées sur lesquelles je m’interroge» en ce moment même ?
Il est évident que McKinney est très au fait des problématiques autour du monde numérique qui envahit notre vie quotidienne et qu’il est préoccupé par les excès potentiels qui pourraient en découler ; excès de sécurité, excès de traçabilité, excès de surveillance…
Faisant référence à un article de The Verge décrivant comment les transports publics français et les autorités chinoises ont utilisé l’intelligence artificielle et la reconnaissance faciale pour suivre les personnes portant des masques pendant la pandémie, Scott McKinney pose une question-clé qui est «Est-ce surveillance ou bienveillance ? Tirer parti de ces technologies est probablement une bonne chose pour protéger les populations en temps de crise majeure, mais pourquoi seraient-elles mises de coté lorsque la crise est terminée ? Et à quoi serviront-elles alors ? »
Ce sentiment ambigu a amené McKinney à regarder autour de lui et à se questionner sur l’utilisation de la reconnaissance faciale aux USA où de plus en plus de caméras de vidéosurveillance sont déployées.
De son coté, Wired et quelques autres magazines ont rapporté que la reconnaissance faciale n’était pas fiable pour la population noire en général, et en particulier pour les femmes noires.
Je ne suis pas tellement préoccupé par mes données personnelles, ma peur est pour les groupes moins représentés.
« Est-ce que cela augmente les inégalités entre les communautés privilégiées et les communautés noires par exemple ? » Et il ajoute: « Je ne suis pas tellement préoccupé par mes données personnelles, ma peur est pour les groupes moins représentés. »
Dans sa performance intitulée «Watch over us / Look down on us» à la Villa San Francisco, il utilise la vidéo pour présenter deux avatars, l’un à l’aspect machinique et l’autre à l’apparence plus humaine… Il explore le fossé entre les promesses de la technologie de surveillance et la réalité de vivre sous perpétuelle observation.
«Watch over us» montre le côté optimiste, soutenu par un monologue et de la poésie. En revanche, «Look down on us» est une sorte de rupture lorsque l’outil ne fournit pas le résultat attendu, et la frustration qu’il peut engendrer.
La performance de Scott McKinney à la Villa San Francisco dans son intégralité.
Quelques instantanés de Scott McKinney
Comment avez-vous vécu le confinement du COVID ?
Le confinement a élargi mon message.
Comment voyez-vous votre art post-Covid ?
Je ne suis pas sûr. Pour être honnête, cette situation m’a impliqué dans beaucoup de travaux qui reposent moins sur l’espace, travail que l’on doit faire dans la perspective d’être présenté dans une galerie. J’ai récemment terminé un projet de jeu vidéo narratif et mon travail pour la résidence est une performance vidéo en streaming par exemple.
Si vous deviez décrire une particularité de l’espace Villa San Francisco ?
La proximité de l’espace du mont Sutro qui est l’endroit idéal pour se recalibrer et faire une balade quand on a besoin d’une pause rapide.
Comment êtes-vous reliés à la France ?
La famille de ma mère a émigré de France au Canada il y a environ 4 à 5 générations, mais mon lien personnel avec la France passe par le street art et l’animation. Depuis un certain temps, je suis des artistes comme JR et C215 et j’aime des films comme I Lost my Body, MFKZ et Persepolis.
Si on vous demande de nous dire spontanément qui est votre artiste préféré en ce moment ?
Depuis longtemps, Barry McGee est un de mes favoris, j’aime la façon dont il combine texte et graphique dans ses œuvres.
Où pouvons-nous voir votre travail et vous suivre ?
Site Internet : Scottymckinney.com
@scottymcslays sur Instagram
Changingwilds.com: https://youtu.be/vKH8V34MGa4
La Villa San Francisco a été créée sous l’égide des Services Culturels de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, de l’Institut de France, du Consulat Général de France à San Francisco et de la French American Cultural Society (FACS) et est aussi soutenue par des partenaires locaux comme UC Berkeley et de généreux donateurs.