“Quelle Année !”… Ce sont les premiers mots d’Emmanuel Lebrun-Damiens au cours de cet entretien qui aura été le dernier en tant que Consul Général de France à San Francisco.

En effet, il quitte ses fonctions cette semaine.

Nous avons parlé Villa San Francisco, états des lieux dans la circonscription, Covid et conséquences sur l’école en particulier… Finalement, nous lui avons demandé de nous parler brièvement de son prochain poste.

Ouverture de la Villa San Francisco

Cette villa renouvelle le concept de résidence d’artistes. Notre objectif est de donner la possibilité aux artistes français de dialoguer avec les américains sur les grands défis de notre siècle.

Nous l’avions pensée sur les défis que soulèvent la disruption technologique, l’intelligence artificielle, la confidentialité des données mais les enjeux écologiques et sanitaires en font partie.

C’est une résidence dans son siècle qui va permettre à des artistes français et américains de développer des partenariats sur l’avenir de notre société. Cela s’inscrit pleinement dans la programmation d’After Tomorrow que nous développons depuis trois ans maintenant. Cette pandémie, ces incendies nous montrent que nous avons besoin d’outils comme ceux-là pour donner aux artistes, aux intellectuels, et aux penseurs des lieux pour réfléchir à ces problèmes.

Un de nos premiers invité sera Alain Damasio auteur de science-fiction dont le dernier livre Les Furtifs a pour sujet la privatisation de l’espace public et la confidentialité des données.

Il réfléchit sur le fait qu’aujourd’hui on sait tout de nos déplacements, de nos achats et il parle aussi du développement des notations. On en voit des exemples en Chine, et aux Etats-Unis avec les crédits scores. Cela pose clairement la question de comment nous allons continuer de “faire société” dans un contexte où l’on devra maximiser les bénéfices de ces technologies tout en en limitant les inconvénients. Ce sont d’immenses défis.

Nous allons faciliter le développement des liens entre artistes français et acteurs locaux. Etant donné l’impossibilité actuelle des déplacements physiques, nous allons utiliser les outils en ligne. Les résidences d’artistes de cinq semaines déjà programmées vont avoir lieu. Le dialogue démarre, simplement il se démarrera en ligne.

En parallèle, il y a la mise en place d’une plateforme virtuelle qui va accueillir une série de panels dont la programmation des semaines à venir est en place.

Et finalement, la Villa San Francisco va intégrer La Nuit des Idées qui a déjà eu deux itérations mais d’autres événements sont en préparation.

Etant donné l’impossibilité pour nos artistes de venir aux Etats-Unis pour l’instant, nous avons prévu d’accueillir des artistes locaux pour des périodes de deux semaines. Vous pourrez retrouver des détails sur le site de la Villa San Francisco.

Il est important de préciser que ce projet de Villa San Francisco est un partenariat entre le Consulat Général de San Francisco, les Services Culturels de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, l’Institut de France et des généreux donateurs qui constituent le Conseil d’Administration.

Pouvez-vous nous donner un instantané de la vie dans la circonscription, et l’éducation, la coopération franco-américaine.

Tout d’abord, quel objectif vous étiez vous donné en arrivant il y a quatre ans ? 

Un service public efficace et accessible ! J’avais la volonté pour moi-même et mon équipe d’être à l’écoute de la communauté et de vivre avec elle. Cela peut se résumer par quelques chiffres comme par exemple l’augmentation en quatre ans de 22% du nombre d’inscrits au Registre des Français au Consulat ou du nombre de passeports que l’on délivre chaque année.

J’ai beaucoup voyagé avec l’équipe pour couvrir cette grande circonscription qui compte dix états. Nous avons ouvert 13 bureaux de vote dans cinq états et trois fuseaux horaires par exemple.

J’ai voulu aller à la rencontre de la communauté pour que les Français de la circonscription ne se sentent pas oubliés même quand ils résident dans un état éloigné géographiquement.

Où en est-on de l’éducation française, en particulier de l’aide financière aux familles suite au Covid ?

Le réseau d’enseignement est dense et comprend à ce jour dix écoles homologuées réparties dans la circonscription. Le coeur du réacteur est le Lycée Français de San Francisco dont la convention a d’ailleurs été renouvelée avec l’AEFE il y a deux mois.

En ce qui concerne les bourses scolaires, nous avons fait un premier examen des dossiers au printemps mais étant donné les circonstances exceptionnelles, nous pourront procéder à des révisions à l’automne. La campagne de bourses est ouverte jusqu’au 18 septembre et nous allons revoir les montants en prenant en compte les pertes de revenus des familles. Tout est fait pour éviter une déscolarisation.

Nous avons aussi trouvé des solutions avec les autorités américaines concernant la venue de nouveaux enseignants français sous visa J1 pour cette rentrée scolaire. La rentrée scolaire est en place.

Quel serait le point d’attention que vous aimeriez mettre en avant pour votre successeur ? 

La sécurité ! Ici tous les risques sont présents, risques naturels, industriels mais aussi certaines violences physiques, et maintenant un risque sanitaire. Concrètement, cela veut dire qu’il faut faire des actions de prévention, expliquer ce qu’il faut faire pour que la communauté soit préparée. Nous ne sommes pas là pour nous substituer à l’aide locale mais nous sommes là pour expliquer comment et où trouver cette aide locale.

C’est valable aussi pour nous, l’équipe consulaire. La présence de ces risques est constante. Nous devons savoir comment réagir quand le problème surgit, être clair sur les actions concrètes à mettre en oeuvre.

Lors d’un entretien précédent, vous nous aviez parlé d’un partenariat entre UCSF et l’Institut Pasteur concernant la lutte contre le Covid… 

Cette collaboration entre l’Institut Pasteur et QBI de UCSF a donné des résultats scientifiques très intéressants sur la recherche de traitements. C’est un cas d’école qui a mis en valeur comment deux institutions qui avaient un partenariat en place avant le début de la pandémie, se sont mises en ordre de marche au moment de la crise. Elles ont recherché si des traitements existants pouvaient avoir une incidence sur le traitement de cette maladie. La dernière vidéo en parle et les résultats ont été repris dans le New York Times, dans le SF Chronicle et d’autres revues spécialisées.

Et si on parlait un peu de vous Emmanuel Lebrun-Damiens ? Pourquoi avoir choisi ce poste de Consul Général à San Francisco il y a quatre ans ?

Quand j’ai fait mes études, j’avais envie d’être dans une fonction dans laquelle on peut améliorer le quotidien des gens et la fonction de Consul Général permet vraiment cela.

Quant à San Francisco, c’est à mes yeux un poste stratégique pour la France car je crois que l’avenir de notre économie est en grande partie dans la Tech. La capitale du financement de la Tech, c’est la Silicon Valley. Je pense que le lien entre les ventures capitalists locaux et l’écosystème de la Tech française est essentiel.

La baie est aussi un vrai laboratoire de réformes. Prenez l’exemple d’Uber, cela a permis une réflexion des autorités de Californie sur le droit du travail pour les travailleurs de la gig économie, mais on parle ici aussi beaucoup d’environnement, de questions de société comme l’égalité femme-homme, les droits LGBTQ. On voit apparaître des réflexions dans cette région avant de les voir émerger dans le reste du monde.

Observer comment la société répond à ces questions localement est stratégique pour nous dans un futur plus ou moins proche.

Mais cela ne s’arrête pas à la baie. C’est toute la circonscription qui permet des contacts avec des organisations qui sont parmi les premières dans leur domaine respectif. Prenez les universités comme Stanford, Berkeley, University of Utah ou l’Institut Paul Allen à Washington, les discussions sont immenses ! C’est rare d’avoir au même endroit cet intérêt stratégique pour la France et cet intérêt intellectuel dans les domaines politiques, sociétaux, culturels et économiques.

J’ai donc eu l’opportunité d’avoir le côté stratégique et stimulant intellectuellement. C’est une grande chance.

Après ces quatre années, quel est finalement le trait marquant de cet endroit tellement unique ?

Le degré d’ambition concernant l’innovation technologique est vraiment impressionnant. Ce que j’ai aimé c’est que l’ambition dans les possibles résonne avec le talent de recherche industrielle que l’on trouve parmi les ingénieurs français. Les américains pensent l’impensable et c’est possible. Mais j’ai découvert que l’on était vraiment complémentaire.

J’ai observé que les américains qui ont une grande liberté dans les idées, trouvent parmi les ingénieurs français en particulier, cette liberté de recherche, de remise en cause de la façon de faire tout en conservant une grande rigueur scientifique.

Nos écosystèmes Tech résonnent très bien ensemble en partie grâce à la formation mathématique et physique des français qui est unique au monde.

La France a autant de médailles Field que les américains en étant un beaucoup plus petit pays.

Nous avons un grand nombre de personnes qui ont atteint un niveau exceptionnel de compétences dans les mathématiques fondamentales qui sont par exemple essentielles pour l’intelligence artificielle.. Le système de formation français est spécifique.

La liberté du projet américain sur l’objectif correspond à la liberté de remise en cause scientifique et la rigueur des ingénieurs français.

Vous partez en Inde pour prendre les fonctions de Conseiller de Coopération et d’Action Culturelle et Directeur de l’Institut Français, basé à New Delhi…

Le poste comprend deux volets, la culture et le rôle de conseiller scientifique.  L’Inde est politiquement un partenaire stratégique pour la France et un enjeu pour les industries culturelles et créatives. D’un côté l’enjeu est de faire connaître aux indiens notre littérature et notre cinéma en allant jusqu’à les encourager à venir tourner des films en France.

l’objectif est aussi de faire venir en France les étudiants indiens dans tous les domaines de la Tech. Ils ont d’excellentes formations technologiques et la France voudrait attirer ces talents pour enrichir notre recherche et nos partenariats scientifiques. Il faut faire découvrir la France aux étudiants indiens.

Je vais retrouver un peu la même chose qu’à San Francisco en alliant importance stratégique et stimulation intellectuelle.

 

Un très grand MERCI. Nous vous souhaitons bonne chance dans vos nouvelles fonctions, et de beaux succès.

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